“La virginité est loin d’être à la mode !”

Zenit, le 12 novembre 2008.

« Noces mystiques », c’est le titre du livre de Janine Hourcade publié cette année 2008 (éd. « Embrasure »), qui présente la spiritualité de l’Ordo Virginum. C’est la première forme de vie féminine consacrée au Christ dans l’Église primitive. Elle a été illustrée notamment par sainte Geneviève de Paris, ou par sainte Marcelline, sœur de saint Ambroise, à Rome. Le livre de Janine Hourcade, de l’Ordo Virginum du diocèse de Toulouse, est accompagné d’une préface de Mgr Emile Marcus, archevêque émérite de Toulouse, qui fut pendant dix ans son évêque.

Zenit – Janine Hourcade, vous publiez un ouvrage sur la vocation à la virginité consacrée, traditionnellement appelée « Ordo Virginum ». Pourquoi un tel livre qui semble aller à contre-courant ?

Janine Hourcade – En effet, la virginité est loin d’être à la mode et il faut être un peu fou pour oser en parler. Mais ce qui est fou aux yeux des hommes est sagesse devant Dieu. Et malgré tout, étant moi-même membre de l’Ordo Virginum, je constate que cette vocation se développe et a une grande vitalité. C’est pourquoi j’ai désiré consacrer un livre à la spiritualité de l’ Ordo Virginum.

Zenit – Quelles sont les étapes de cette vocation dans l’histoire de l’Église ?

Janine Hourcade – On pourrait croire que cette vocation est récente, car on en parle depuis peu. Mais bien au contraire, elle est très ancienne, bien qu’elle soit connue depuis peu de temps. Elle remonte aux origines, au texte même des Actes des Apôtres, et elle a été très vivante jusque vers les Ve, VIe siècles. Après quoi, remplacée par la vie religieuse en communauté, elle a disparu. Mais le concile Vatican II l’a restaurée, par le biais de la liturgie de la consécration des vierges qui est très ancienne.

Zenit – Vous évoquez la liturgie en effet comme élément premier de cette consécration. Quels en sont les principaux éléments 

Janine Hourcade – Cette liturgie établit cette consécration comme des noces. C’est pourquoi le titre de mon livre est « Noces mystiques ». Dès le début de la célébration, on chante l’antienne : « Voici l’Époux qui vient, allez à sa rencontre », « Ecce Sponsus venit, exite obviam ei ». Tout au long de la consécration règne la symbolique nuptiale des épousailles. Et, comme dans toute union nuptiale, on y trouve les présents du Christ Époux et la dot de l’épouse.

Zenit – Quelles sont les implications anthropologiques les plus importantes ?

Janine Hourcade – Et justement, c’est dans la dot de l’épouse qu’on les trouve plus clairement exprimées. L’épouse se présente comme vierge, c’est là ce qu’elle offre à l’Époux. Et il ne s’agit pas d’une virginité abstraite, vague ou simplement sociale. Il s’agit d’une virginité réelle et corporelle. Il ne faut pas minimiser cela : l’intégrité physique de la vierge est indispensable et, comme le dit saint Thomas, « la liturgie ne saurait mentir ».

Zenit – Vous soulignez aussi combien cette vocation est ancrée dans le diocèse, avec une forte référence épiscopale, comment cela ?

Janine Hourcade – En effet, étant donné que la vierge ne vit pas en communauté, elle n’a donc pas les trois vœux de pauvreté, obéissance et chasteté, avive d’autant plus son sens de l’évêque. C’est par l’évêque qu’elle est véritablement d’Église, et ce lien à l’évêque est capital. Il n’est pas très sain de voir des vierges consacrées changer d’évêque sans avoir de solides raisons.

Zenit – En quoi cette vocation est-elle prophétique dans le monde d’aujourd’hui ?

Janine Hourcade – Elle est prophétique à deux niveaux. D’abord, elle brille d’un éclat singulier dans notre civilisation contemporaine où la sexualité est très débridée et ne connaît aucune limite. A un second niveau, si l’on revient à l’origine historique des vierges consacrées, on sait qu’elles se sont épanouies dans un monde romain décadent au moins aussi dépravé que le nôtre. Et elles ont porté témoignage et leur exemple a fait peu à peu évoluer la société païenne vers une société chrétienne. Pourquoi les vierges consacrées d’aujourd’hui ne pourraient-elles pas porter également témoignage et faire une petite révolution sociologique dans notre monde actuel ?

Propos recueillis par Anita S. Bourdin.

Janine Hourcade a fait une carrière de professeur de lettres. Elle est docteur en théologie et sa thèse de doctorat défendue à l’Université catholique de Toulouse, et publiée en 1986, a pour titre : « La femme dans l’Église ». En 1990, un autre ouvrage de l’auteur posait la question : « L’Église est-elle misogyne ? ». En 1992, l’auteur demandait : « Pourquoi la femme ? », en 1993 : « Des femmes prêtres ? ». En 1997, elle a publié : « Une vocation féminine retrouvée », et en 2002 « Sainte Geneviève », à l’occasion des célébrations, civiles et religieuses, à Paris et à Nanterre, en l’honneur de celle qui a « sauvé Paris » (préface du card. Paul Poupard).
A Rome, la théologienne française avait fait salle comble naguère, lors de la présentation d’un autre livre : « L’Éternel Féminin. Femmes mystiques », dans le cadre d’un « Café littéraire » du Centre culturel Saint-Louis de France. « Noces mystiques » a l’Imprimatur de l’archevêque de Toulouse, Mgr Robert Le Gall. Adressé par l’auteur à Benoît XVI, le livre a reçu les louanges de la Secrétairerie d’État et du cardinal Franc Rodé, préfet de la congrégation pour les Instituts de Vie consacrée et les Sociétés de vie apostolique.

Photo © Elisabeth Vilain

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